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Progressivement, sous l'influence du cubisme, Picasso va s'éloigner de cette facture classique et affirmer son propre style. Avec Braque, Picasso expérimente la déconstruction de l'objet, l'objet n'est plus un mais il devient multiple, et pourtant visible en un seul regard sous toutes ses facettes. Et non seulement les objets vont suivre cette déformation et cet enrichissement, mais également les visages et les corps vont connaître le même processus.
Et cela va nous amener à des rencontres que nous ne soupçonnons pas. Ainsi en est-il pour le "Grand nu au fauteuil rouge", peint en 1929 (huile sur toile, collection musée national Picasso, Paris) qui
dialogue à la fois avec "Madame Moitessier" d'Ingres (1856, the National Gallery, Londres, à gauche) présent au côté de l'œuvre à l'exposition, et avec l''"Odalisque au tambourin" de Matisse (1925-1926, the William S. Pacey Collection, MoMA, New-York, à droite), tableau qui ne figure pas à l'exposition.
Picasso s'est approprié les différents éléments de ces deux toiles en les réinterprétant pour faire une œuvre qui lui est propre : le fauteuil rouge, l'importance de la robe dans le tableau d'Ingres, le jeux des couleurs (blanc, rouge, vert et une pointe de jaune), le prisme déformant des miroirs, et l'évocation des odalisques chères à Matisse qui est reprise par la puissance du trait noir silhouettant à lui seul la femme, qui se tient dans la même position que chez Matisse, avec le bras au dessus de la tête. Autant chez Ingres, on sent la tranquillité, voire une certaine suffisance que rien n'altère, chez Matisse, une certaine nonchalance et volupté, autant chez Picasso, on sent dans la déformation et l'étirement du corps de la femme une grande souffrance. Nous sommes littéralement interpellés ...
Et d'autres portraits encore dans cette exposition vont nous interpeller par leur expressivité et la violence de leurs couleurs, comme "Mousquetaire et Cupidon", 1969 (Museum Ludwig, Cologne) ou comme cette "Tête d'homme", peinte en 1971 (collection particulière), qui personnellement me fait penser à la tête du Christ.
"Vêtu d'habits rouge et or, portant fraise, cape, bottes et chapeau à
plumet, ce personnage de mascarade arbore la panoplie d'une virilité
exubérante : moustache, barbe, pipe, sabre ou épée. Ce héros baroque
surgit alors que Picasso étudie les Hommes au casque, au faucon, au
bâton dont Rembrandt et Vélasquez peuplent eux aussi leurs toiles. «
Cartes de tarots », comme les intitulait André Malraux, ces figures
forment une longue suite de Portraits virils, comme autant de
confrontations identitaires où l'artiste vient refléter son propre
visage, ses propres hantises" à la fin de sa vie (extrait de kawa.fr).
Et laissons la parole à Picasso ! "Quelques années plus tard, visitant une exposition de dessins d’enfants, il remarqua : « quand j’avais leur âge, je dessinais comme Raphaël, mais il m’a fallu toute une vie pour apprendre à dessiner comme eux. »
Mais, il reste encore d'autres rencontres surprenantes ... à suivre ...
La réputation du grand Picasso est mondiale... Son talent est indéniable... pourtant, si on m'offrait une de ses toiles "de son propre style", je serais ennuyée... Ses visages déjantés me dérangent... (voilà sans doute une preuve de plus de mon inculture dans l'art...) :-)
Bonne après-midi ensoleillé à vous deux!
Rédigé par : Tilleul | 27 janvier 2009 à 14:17
Je pense que ce qui me fascine le plus chez Picasso est son succès.
Rédigé par : joye | 27 janvier 2009 à 15:37
> Tilleul, je ne pense pas que cela soit une preuve d'inculture dans l'art, je pense plutôt que nous ressentons certaines impressions devant des œuvres d'art et que nous pouvons les apprécier ou non, cela n'a rien à voir avec la culture ...
C'est vrai que lorsque j'étais plus jeune, les œuvres de Picasso me semblaient très lointaines par rapport aux références dont je pouvais disposer (grosso modo jusqu'au mouvement impressionniste), maintenant je parviens à en apprécier certaines, mais pour autant, s'il faut vraiment que je dévoile mes goûts, je préfère des peintures beaucoup plus abstraites ...
Bonne fin d'après-midi et bonne soirée :-) !
> Joye, il était indéniablement un surdoué en peinture, mais certainement également un surdoué en communication ...
Belle après-midi ! -:) !
Rédigé par : Laëtitia Delaide | 27 janvier 2009 à 17:44
C'est que les surdoués sont souvent surestimés. ;-)
(ah, n'écoute pas, c'est mon côté ignart (sic) qui sort...)
Rédigé par : joye | 28 janvier 2009 à 14:50
Tu crois ? ;-)!
Rédigé par : Laëtitia Delaide | 28 janvier 2009 à 16:39
Google dit que c'est aujourd'hui (mercredi) l'anniversaire de Jackson Pollock.
:-)
Rédigé par : joye | 28 janvier 2009 à 19:03
Voilà un artiste que j'adore ! J'ai visité, il n'y a pas très longtemps, l'exposition qui lui est consacrée à la Pinacothèque de Paris "Pollock et le chamanisme" et d'ici peu je compte bien en parler ! http://www.pinacotheque.com/index.php?id=167
:-) !
Rédigé par : myriam | 28 janvier 2009 à 20:03
A propos de Pollock, tout à l'heure, quand mon petit-fils (8 ans)a allumé l'ordi (une œuvre de Pollock dissimulait le nom Google), il me dit "Wouai, viens voir mamie, aujourd'hui c'est l'anniversaire des tags!"... Donc, je serai contente de découvrir le billet sur cet artiste... Bonne soirée!
Rédigé par : Tilleul | 28 janvier 2009 à 21:30
Merci Tilleul et bonne soirée à toi également !
Rédigé par : Laëtitia Delaide | 28 janvier 2009 à 21:44
Quand je vois les tableaux de Pollock (et certains par Picasso), je me dis que je pourrais faire autant. Et bien que j'aime dessiner, je me dis qu'ils ont eu le don d'être dans le bon endroit au bon moment. Mais s'agit-il d'un don artistique au sens classique du mot ? Je n'ai pas encore décidé.
Mais comme j'ai dit deux fois sur mon blog ce soir, nous sommes tous des artistes. Et cela, je le crois sincèrement.
Rédigé par : joye | 29 janvier 2009 à 00:33
Hello Joye ! Oui, c'est vrai de temps en temps en visitant des expositions, je me dis que je pourrais en faire autant, pour autant je ne le fais pas, et je me dis que si ces artistes ont réussi c'est qu'il avait véritablement du talent, quelque chose de singulier à raconter au travers de leur art, en l'occurrence la peinture, comme d'autres peuvent raconter quelque chose de singulier au travers des mots, par les photographies, etc ...
Je ne sais pas si nous sommes tous des artistes, je pense que certaines personnes ont une extrême sensibilité (voire une sensibilité exacerbée) qui s'exprime au travers de l'art ...
Belle journée ensoleillée et bleutée !
Rédigé par : myriam | 29 janvier 2009 à 12:30
Mais justement, je soupçonne que d'autres personnes aient pu faire pareil, peut-être mieux, mais qu'ils n'avaient pas l'outrecuidance de se proclamer, qu'ils n'avaient pas les connexions, et encore quoi, je ne sais. Peut-être qu'ils s'occupaient de leur famille...
Est-ce donc impossible pour les gens bien de réussir dans le monde d'art ? ;-)
(je ne fais que blablater, pas besoin de me répondre)
(mais merci pour l'occaze d'y réfléchir)
Rédigé par : joye | 29 janvier 2009 à 15:17
Quel courage de pouvoir bloguer autour de cet olibrius !
Je ne le supporte absolument pas, mais j'aime bien votre blogue !
Rédigé par : grillon | 29 janvier 2009 à 19:50
> Bonsoir Joye, oui cela doit certainement arriver, par exemple les œuvres de Séraphine, sans la rencontre exceptionnelle avec le négociant d'art Wilhelm Uhde, auraient pu rester inconnues du grand public, voire détruites ou moisir dans une cave ou dans un grenier ...
> Bonsoir Grillon, merci pour le compliment, et cette exposition est tellement riche en émotions qu'il était tout naturel que nous en parlions ici ...
Rédigé par : myriam | 29 janvier 2009 à 21:44
j'ai toujours éprouvé un profond malaise à la vue de ces toiles déconstruites
mais à la lumière de diverses choses, dont mon propre malaise à me trouver une place dans le monde actuel, que je trouve fou et plus du tout démerdable ... eh bien soudain, je comprends quelque chose, l'artiste témoignant de son monde et du ressenti de sa propre place dans ce monde, qu'il voit éclater, et dont il essaye de regarder tous les aspects pour tenter de comprendre ... bon ... c'est mon ressenti ...
si je devais peindre à l'heure actuelle, ce ne serait probablement pas "beau" à l'œil ...
les artistes sont témoins et transmetteurs, parfois inconscients, toujours en avance, je crois
merci ... vraiment ;)
Rédigé par : mariev | 30 janvier 2009 à 19:02
Bonsoir Mariev, oui c'est très vrai ce que tu dis "les artistes sont témoins et transmetteurs, parfois inconscients, toujours en avance", c'est ce que je ressens parfois ... Je me souviens comme cela de la fin d'une exposition où les tableaux peints quelques années avant la deuxième guerre mondiale m'ont vraiment fait penser aux futurs déportés et aux camps de concentration ...
Bonne fin de soirée à toi :-)!
Rédigé par : Laëtitia Delaide | 30 janvier 2009 à 22:28